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★★★☆☆ La Banque Nemo


Marguerite Viel & Jean Choux / 1934 / France-Allemagne


Avec : Victor Boucher (Gustave Lebrèche), Mona Goya (Charlotte Rambaut), Charles Fallot (M. Nemo, le banquier), Alice Tissot (Clémentine Nemo), René Bergeron (Émile Larnoy, le chef caissier), Gustave Gallet (M. Biscotte), Henry Bonvallet (Vauclin, un ministre), Guilhon [= Robert Guillon] (un ministre), Fred Marche (Isidore Pignolet, le fondé de pouvoir), Georges Pally (le président du Conseil), Georges Six (le client de la banque Nemo), Claire Gérard (la locataire), Micheline Bernard (la dactylo ?), Georges Prieur (Tibère, le ministre de la Justice), Gaston Mauger (un ministre), Henry Charrett (le journaliste), André Carnège (Vigier, l’inspecteur de la Sûreté), Roger Astruc, Viviane Breïno [= Vivette Breïno], Guy Rapp.


De l’irrésistible et spectaculaire ascension sociale de Gustave Lebrèche, simple vendeur de journaux devenu en l’espace de quelques mois garçon de bureau puis caissier de la banque Nemo. Une fois l’amant de la nouvelle épouse du directeur, il devient sans difficulté le fondé de pouvoir de l’établissement après avoir fait en sorte que soit révélé l’adultère, vieux de cinq ans, de la première Mme Nemo avec le titulaire du poste...


Dernier long-métrage de Marguerite Viel (1894-1976), notamment réalisatrice, deux ans auparavant, d’une transposition à l’écran de la comédie de Georges Feydeau Occupe-toi d’Amélie (1932), interprétée par Renée Bartout et Jean Weber.


Le film failli être totalement interdit par la censure, puis fut finalement autorisé, après coupure d’une séquence longue de 500 mètres montrant un conseil des Ministres. Les autorités de l’époque redoutaient que le public n’y voit une allusion transparente à l’affaire Stavisky… alors que la comédie de Louis Verneuil avait été écrite - et jouée – trois ans plus tôt. La scène en question figure bel et bien dans la copie DVD diffusée sur France 3 dans la nuit du 20 au 21 janvier 2013.

Le cynisme joyeux – et parfois décapant – de la comédie d’origine, créée trois années auparavant par Victor Boucher, René Bergeron, Saturnin Fabre, Charlotte Lysès, Blanche Montel sur la scène de la Michodière, buttent en permanence sur les limites d’une mise en scène sage (trop), engoncée (souvent), académique (presque toujours). Le propos a beau évoquer le souvenir récent de Topaze pièce et film, en même temps qu’il annonce l’esprit d’Avec le sourire (Maurice Tourneur, 1936) ou même d’À nous deux, Madame la Vie (Yves Mirande & René Guissart, id.), chefs-d’œuvre d’humour autrement plus enlevés, subtils et politiquement incorrects, l’ensemble ne décolle véritablement, dix minutes avant la fin, qu’avec l’anthologique séquence du conseil des Ministres, mise en scène avec la vivacité qui s’impose et formidablement interprétée par Bonvallet, Pally, Prieur, Mauger et une demi-douzaine d’autres, pas nécessairement identifiés, tous au diapason les uns des autres. Le reste ne tient guère que sur le numéro au cordeau de Victor Boucher, à la fois fort de son capital sympathie auprès du public et certain de ses effets, et la composition, absolument bluffante, de René Bergeron, employé de façon bien moins utilitaire qu'à l'accoutumée. Mona Goya, habile et professionnelle jusqu’au bout des ongles, restitue de manière supérieurement adroite la fausse candeur de la petite femme devenue du jour au lendemain épouse de banquier (et néanmoins prête à coucher utile pour aider son mari à parfaire son ascension sociale), sans être tout à fait le personnage : une décennie plus tard, elle fera nettement mieux chez Guitry. Prisonniers, en revanche, de stéréotypes sans grand intérêt, Alice Tissot – peu à son aise dans ce qui reste malgré tout son emploi-type, et comme bridée par ce qui tient lieu de mise en scène – et Charles Fallot - le patronyme lui convient mieux que le personnage - déçoivent, et l’on regrette un peu que Saturnin Fabre, créateur historique du rôle du banquier Nemo sur les planches, n’ait pas eu l’occasion de transformer l’essai à l’écran : le film y eût assurément gagné en folie, et c’est la folie, précisément, qui lui fait défaut de bout en bout. Extrêmement plaisant, sympathique en diable, enlevé et même à franchement parler épatant par moments, mais vite ronronnant.

© Armel De Lorme / L’@ide-Mémoire, 2016-2018.

Photo : Victor Boucher et Mona Goya, René Chateau/La Mémoire du Cinéma, D.R.

Version remaniée d’un texte extrait de l’Encyclopédie des Longs-Métrages français 1929-1979 - Suppléments A~D # 2 (Armel De Lorme, L’@ide-Mémoire, 2016). Toute reproduction même partielle interdite, sauf autorisation écrite des auteur et éditeur.

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