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★★★★☆ Si Paris nous était conté..!


Sacha Guitry & Eugène Lourié / 1955 / France

1955. France. PR DÉL : Clément Duhour (CLM). PR ASS : Alain Poiré (Gaumont) & Henry Deutschmeister (Franco London Films). RÉ : Sacha Guitry. RÉ ADJ : Eugène Lourié. SC, AD & DIAL : Sacha Guitry, d’après sa revue Histoires de France, créée sur la scène dy Théâtre Pigalle le 07 octobre 1929, et son scénario inédit À la Bastille (1948). IM : Philippe Agostini (Technicolor). CAD : Jean-Marie Maillols & Raymond Letouzey. ASS OP : Roland Paillas, André Genghlésys & Georges Barsky. PH PL : Jean Klissac. SON : Joseph de Bretagne & Émile Lagarde (Western Electric). REC : Max Olivier. PERCH : Gaston Demède. MUS : Jean Françaix. DIR MUS : Marc Lanjean. ÉD MUS : Éditions Tour Eiffel & Éditions Transatlantiques. CHAN : la Ballade du Trouvère est interprétée par Gérard Philipe, la chanson de Béranger Parlez-nous de lui, Grand-Mère, de Béranger est interprété par Albert Duvaleix, la chanson Dites-lui qu’on l’a remarqué, distingué… , de l’opéra-bouffe de Jacques Offenbach La Grande-Duchesse de Gerolstein est interprété par Giselle Pascal & la chanson Paris est en fête, de l’opéra de Gustave Charpentier Louise, est interprétée par Léna Pastor. MDB : Stanley Barry. MONT : Paulette Robert. ASS MONT : Nadine Marquand [= Nadine Trintignant]. DÉC : René Renoux & Henri Schmitt. DÉC EN 2ND : Pierre Tyberghien. CRÉA COST : Monique Dunan. CHEF COST : Jacques Cottin. ROBES : Maggy Rouff. CHEF MAQ : Monique Archambault. PERR : Alex Archambault. 1er ASS RÉ : Jean Vivet, assisté de Marcel Rey. 2ème ASS RÉ : Daniel Aubry. SCR : Francine Corteggiani. RÉPÉT : Flore Florenne. RÉG GÉN : André Chabrol. RÉG GÉN EN 2nd : Roger Rosen. RÉG ADJ : Charles Lahet. RÉG ENS : Roger Bar. CDP : François Granier & (non créditée) Danièle Granier. DIR PR : Gilbert Bokanowski. ADM PR : Pierre Aubart. ADM PR ADJ : Claude Viriot & Lucien Susbielle. SECR PR : Arlette Lebel & Yolande Darmaga. PR : CLM (Clément Duhour), Franco London Films & SNEG Gaumont. DIST ORIG : Société Nouvelle des Établissements Gaumont. EXT : Paris & parc des Expositions à la porte de Versailles. TIR : Laboratoires GTC à Joinville-le-Pont (Val-de-Marne). AUDI : SMIO [= SIMO]. DÉB : 18/08/1955. FIN : 10/11/1955. GALA : 26/01/1956 (Opéra de Paris). PP : 10/02/1956 (Gaumont-Palace, Paris & Berlitz). DUR : 135 mn. VISA : 17.174. Premiers titres : Si Paris m’était conté… / Paris, mon bien aimé.


FOURNISSEURS : Chaussons de danse de la maison Repetto. Maquillage de la maison Brandel-Hambourg. Fourrures des Établissements Chapal. Artifices des Établissements Ruggieri. Matériel électrique des Sociétés : LMC, Lumex et Mole Richardson. Clavecin : Pleyel.


AVEC : Françoise Arnoul (la duchesse de Bassano), Jeanne Boitel (Mme Geoffrin & Sarah Bernhardt), Gilbert Boka [= Gilbert Bokanowski] (Louis XVI & Hugues Aubriot), Julien Carette (le cocher dreyfusard), Danielle Darrieux (Agnès Sorel), Sophie Desmarets (Rose Bertin), Clément Duhour (Aristide Bruant), Sacha Guitry (Louis XI & l’auteur), Odette Joyeux (la passementière), Robert Lamoureux (Jean Danry de Masers de Latude), Pierre Larquey (le conseiller Pierre Broussel), Jean Marais (François Ier), Jean Martinelli (Henri IV, Firmin Lefebvre & Cyrano de Bergerac), Lana Marconi (Marie-Antoinette), Michèle Morgan (Gabrielle d’Estrées), Jean Parédès (le 3ème médecin de Charles VII), Giselle Pascal (la comtesse de Montebello), Gérard Philipe (le trouvère « de père en fils »), Simonne Renant [= Simone Renant] (la marquise de La Tour-Maubourg), Renée Saint-Cyr (l’Impératrice Eugénie), Jean Tissier (le gardien du musée Carnavalet), Andrex (Paulus), Antoine Balpêtré (Paul Verlaine), René Blancard (M. Aubineau), Pauline Carton (la bouquiniste), Aimé Clariond (Beaumarchais), Paul Colline (Charles VII), Suzanne Dantès (Mme d’Épinay), Jean Debucourt (Philippe de Commynes), Jean-Jacques Delbo (M. de La Personne), Bernard Dhéran (Voltaire jeune), Denis d’Inès (Fontenelle), Henri Doublier (le dominicain), Émile Drain (Victor Hugo), Pierre Dudan (le 1er manifestant), Jacques Dumesnil (le cardinal de Richelieu), Catherine Érard (la journaliste), Maurice Escande (le baron de Grimm), Jacques de Féraudy (Voltaire âgé), Michel François (le 5ème visiteur), Louis de Funès (Antoine Allègre), Jeanne Fusier-Gir (la patronne de l’auberge), Gilbert Gil (Molière), François Guérin (le 2ème visiteur), Marguerite Jamois (Anne de Savoie [= Charlotte de Savoie]), Roland Lesaffre (le 1er royaliste), Robert Manuel (Gustave Flaubert), Jacques Morel (le gouverneur Jourdan de Launay), Lucien Nat (Montesquieu), Claude Nollier (Anne d’Autriche), Pierre Palau (le 1er moine), Jean Paqui (le comte d’Orgeix), Simone Paris (la dame au Louvre), Marguerite Pierry (Caroline Delanoy, la centenaire), Odile Rodin (la princesse d’Essling), Claude Sylvain (Catherine de Médicis jeune), Pierre Vaneck (François Villon), Jean Weber (Henri III), Paul Fort, prince des Poètes (Paul Fort), Maurice Utrillo (Maurice Utrillo), Siren Adjemova (la baronne de Pierres), Jean-Marc Anthony (un lieutenant de police), Fernand Bellan (Tristan l’Hermite & Fouquier-Tinville), Henri Belly (le valet de pied de la marquise de Sévigné), Roland Bourdin (le 1er visiteur), Henri Bosc (le baron de Vendeuvres), Alain Bouvette (M. Duval), Wladimir Brasco [= Vladimir Brosko] (Nijinsky), Laurent Capelli (le 4ème visiteur), Brigitte [Ségui] de Carreras (la ravissante femme), André Chanu (Sully), René Charle [= René Charles] (le gouverneur Pierre Baisle), Pierre Darcey [= Pierre Darçay] (Jules César), Micheline Dax (Yvette Guilbert), Paul Demange (M. Thiers), Jacques Derives (l’officier municipal), Germaine Dermoz (Catherine de Médicis âgée), Jean Dunot (le 2nd moine), René Dupuy (M. Durand), Albert Duvaleix (Béranger), Jim Gérard (le cocher antidreyfusard), Lucienne Granier (la provinciale élégante), Gisèle Granpré [= Gisèle Grandpré] (la marquise de Sévigné), Janine Grenet (Marguerite de Valois), Françoise Jacquier (la 1ère amoureuse), Pierre Jadoux [= Henri Jadoux] (Jacques Callot), Ariane Lancell (Diane de Poitiers), René Lefebvre-Bell [= René Lefèvre-Bel] (D’Alembert), Maria Lopez (la marquise de Las Marismas), Marcel Lupovici (Marcel Paul), Pierre Massimi (le photographe), Albert de Médina [= Albert Médina] (Paul Tabout), Annie Monnier, Hubert Noël (le 2ème officier de police), Nadine Olivier (la duchesse d’Étampes), Xénia Palley (Tamara Karsavina), Léna Pastor (Marthe Rioton, la chanteuse), Josette Privat (la servante de la taverne), Jacques Ralph [= Jacques Ralf] (un gardien de prison), Jean-François Rémi (le cardinal Mazarin), Philippe Richard (Louis-Philippe Ier), André Roanne (Diderot), Catherine Romane (l’amie de la jolie femme), Madeleine Rousset (la jolie femme poudrée par Léonard), Roger Royer (le 1er officier de police), Serge Sauvion (le 3ème officier de police), Georges Spanelly (le baron de Bourgoin), Alice Tissot (Mme Denis), Irène Tunc (la comtesse [en fait baronne] de Malaret), Pierre-Jean Vaillard (Coitier), Jacques Varennes (Édouard Schérer [= Edmond Schérer]), Jeanne Véniat (Mme Lefebvre, la mère de Firmin), Pierre Would, Amédée (le 1er pêcheur à la ligne), Max Amyl (un huissier du Parlement), Louis Arbessier (Louis XIII), Alex Archambault (Léonard, le maître perruquier), Bob d’Arcy (un gardien au Louvre), Florence Arnaud (la comtesse de [Lezay-]Marnésia), Louis Arbessier (Louis XIII), André Aubert (un ecclésiastique auprès de Mazarin), Georges Aubert (le critique inconnu), Antoine Baud (le 2ème royaliste), Charles Bayard (un aristocrate âgé au Café Procope), Edmond Beauchamp (le 1er révolutionnaire au Café Procope), Philippe Béharn (le 1er gardien-chef), René Bernard (Ravaillac), M. Berryer (un gardien-chef), Jacques Bertrand (Mirabeau), Georges Bever (Gustave-Henri & le 2ème médecin de Charles VII), Gérard Boka [= Gérard Bokanowski] (Henri III enfant), Jean-Marie Bon (le 2ème joyeux drille), Caillabet (le 3ème royaliste), Michèle Cancre (la comtesse d’Orgeix), Jacqueline Carlier (la femme couchée), Denise Carvenne (Mme Élisabeth), Charley (un joyeux drille), Louise Chevalier (la 2ème visiteuse au musée Carnavalet), Ferna Claude (la 1ère tricoteuse), Sylviane Contis (Jeanne d’Arc), Jean-Paul Coquelin (Maurice de Féraudy interprétant Mascarille), Henri Coutet (un promeneur entrant au Café Procope), Georges Cusin (le 3ème pêcheur à la ligne), Max Dalban (Jules Villé), Madeleine Damien (Mme Bertrand), Darbe (un juré), Guy Denancy (le 4ème royaliste), Lucien Desagneaux (un révolutionnaire), Jean Droze (Hubert), Jean-Pierre Duclos (Gustave, le monsieur au Louvre), Jean-Marie Fertey (Jasmin, le valet de Voltaire), Régis Fontenay (un mignon d’Henri III), Marie Francey (la 2ème religieuse & la 1ère bourgeoise), Gaulin (le gouverneur Berryer), Émile Genevois (le 2ème pêcheur à la ligne), René Génin (le patron menuisier), Henri Guégan (le porte-clefs), Paul Guers (le comte de Villars, rôle coupé au montage), Yvonne Hébert (la 1ère visiteuse au musée Carnavalet), René Hell (un vieux révolutionnaire), Guy Henry (Sanson), Bob Ingarao (le 1er joyeux drille), Raymond Isella (Napoléon III), Charles Lahet (Louis Pasteur), Lopez (le général Bonaparte), Pierre Lord (le 1er chirurgien), Fabiène Mai (la 1ère religieuse), Guy Mairesse (un prêtre , n’apparaît pas dans les copies actuellement visibles), Jacques Mancier (M. de Villette), Guy Marly (un révolutionnaire), Félix Marten (le marquis de Mirebeau), Valère Mauroy (Valère), Albert Michel (Victorien Bernard), Gilbert Moryn (Danton), Maria Nelson (Charlotte Corday), André Numès Fils (le Français moyen), Joseph Pallazolo (Toulouse-Lautrec), Marcel Pérès (Herman), Pierre Perret (un hussard), Claudie Petit (une dame au bal des Tuileries), Raymond Pierson (un consommateur au Café Procope), Joël Plouvin (le 3ème visiteur), Stéphane Prince (l’étudiant du quai Voltaire), Guy Provost (l’ouvrier ébéniste), Guy Rapp (Marat), Marcel Rey (Victor), Louise Roblin [= Louison Roblin] (une perruquière), Bernard Roland (le 1er amoureux), Marcel Rouzé (le laquais de Beaumarchais), Louis Saintève (un vieux révolutionnaire), Annik de Saligny [= Annik Beauchamps] (la femme de chambre de Caroline Delanoy), Jacques Sancerre (Camille Desmoulins), Alain Saury (Arsène), B. de Trévis (le monsieur élégant), Pierre Vernay [= Pierre Vernet] (Henri II), Louis Viret (un gardien de prison), Claude Viriot (Victor Hugo « Bis »), Dominique Viriot (Louis XIV enfant), Michel Vocoret (un jeune homme au bal des Tuileries), Léon Walther (le vieux royaliste apostrophant Beaumarchais), Catherine Brieux, Huguette Cléry [= Huguette Hatem], Daniel Crohem, Chantal Després, Jean Filliez, Josette Pierson, Jean-Marie Robain, René Tabès, Georges Tat, et une centaine d'autres gardés en réserves...

L’histoire de Paris, de ses origines à 1955, racontée à de jeunes étudiants par Sacha Guitry, sous forme de « déclaration d’amour lucide ». Sont notamment évoqués la première rencontre de Charles VII et d'Agnès Sorel, la création de l’imprimerie sous l’impulsion de Louis XI, le Louvre au temps de François Ier, le vol de la Joconde, la nuit de la Saint-Barthélemy, l’assassinat d’Henri III par un moine fanatique, l ’abjuration d'Henri IV à la prière de sa maîtresse Gabrielle d’Estrées, la fondation de l’Académie Française de Richelieu, l’embastillement du conseiller Broussel et celui du jeune Voltaire, l’énigme de l’homme au Masque de Fer, les multiples évasions de Latude, les salons littéraires de Mmes Geoffrin et d'Epinay, le règne de Rose Bertin sur la mode 1780, l’agonie de Voltaireet son enterrement à la sauvette, la prise de la Bastille commentée par Beaumarchais, l’exécution de Louis XVI et le procès de Marie-Antoinette, les soirées littéraires au café Procope, la Commune de Paris, l'affaire Dreyfus, les premières de Louise, de Cyrano de Bergerac et de L’Aiglon, la découverte du vaccin antirabique par Pasteur, Paul Fort et Utrillo à Montmartre...


Codicille au diptyque " Versailles-Napoléon ", Si Paris nous était conté… est aussi, assurément, le plus sympathique des trois volets composant la série " Histoires de France ". D’abord, parce qu’ayant – enfin – renoncé à se faire le chantre officiel d’une IVe République mi-languissante, mi-douteuse, son auteur-metteur en scène s’est débarrassé en même temps de la tendance au pompiérisme qui desservait en partie les opus précédents : formellement, Si Paris… est proche de Remontons les Champs-Élysées…, Danielle Darrieux et la Couleur en plus. En premier lieu, parce que le choix de " la plus belle avenue du monde " comme celui, à 17 ans d’intervalle, de " la plus belle ville du monde " ne constitue au fond qu’un (double) prétexte à convoquer dans le(s) même(s) long(s)-métrage(s) des figures historiques disparates – et qui n’auraient jamais du s’y " rencontrer " : Louis XV et Offenbach, Wagner et Rousseau dans le premier, Henri IV, Richelieu, Voltaire et une infinitude d’autres dans le second. Mais le véritable tour de force que constituent le scénario et la réalisation de Si Paris… est ailleurs. À travers les figures les plus attachantes de son film – essentiellement les poètes, les écrivains, les philosophes et autres empêcheurs de penser en rond, c’est l’esprit de Paris que Guitry s’attache avant tout à restituer. Certes, comme dans toutes les fresques hystérico-historiques qui ont précédé, le tracklisting des personnages comporte son lot traditionnel de rois et de reines, de ministres et de favorites. Mais pour la première fois, l’intérêt du démiurge Guitry se porte ailleurs : les figures emblématiques sinon essentielles de son Paris à lui-moâ, ce sont Beaumarchais et Béranger, Verlaine et Villon, Molière et Montesquieu – les trois personnages les plus privilégiés en terme de " temps de présence à l’écran " étant par ailleurs Voltaire, Latude et le " Trouvère de père en fils ", autrement dit trois contestataires-nés. En bref, tout se passe comme si, à l’inverse d’ex-jeunes lions de cinéma devenus avec l’âge et les honneurs d’authentiques vieux cons, Guitry avait décidé à 70 ans passés d’abattre la carte de la subversion chic – osant du même coup tout ce qu’il n’avait jamais osé jusqu’alors : un recyclage à peine déguisé de saynètes écrites pour la scène 25 ans auparavant (1), une confrontation d’Henri IV et de son " sosie officiel " à quelques heures de l’attentat de la rue de la Ferronnerie, un défilé ininterrompu de cercueils se croisant aux portes du Panthéon, deux ou trois séquences " chiffons " (Rose Bertin ; l’impératrice Eugénie et ses dames d’honneur…) à faire pâlir d’envie les folles les plus furieuses du Marais et de la place des Vosges… pour de rien dire de jeux de mots laids qui seraient franchement déplacés s’ils n’étaient si savoureux. Qui d’autre, avec le recul, que Guitry pour pouvoir se permettre, de faire dire à Marat " Qu’elle entre ! " à propos de Charlotte Corday, avant de ponctuer l’assassinat du tribun d’un lapidaire " Et elle entra. Profondément ". Facilité que tout cela ? Bien sûr. Illustration, sous couvert de pure gratuité, du goût notoire de Guitry pour l’humour noir, les morts violentes et les cadavres exquis ? La chose est nettement plus probable : le film lui-même n’est-il pas, après tout, construit à la manière d’un gigantesque cadavre exquis au sens surréaliste du terme, et dont les scènes les plus réussies, comme dans Les Perles de la Couronne et Remontons les Champs-Élysées, sont presque toujours les plus morbides ? Qu’importe dès lors que Guitry se soucie de la Ville-lumière en elle-même – et par la même occasion de ses monuments – comme d’une guigne : son postulat aurait-il été radicalement différent que les contraintes budgétaires liées à la production l’auraient de toutes les manières conduit à privilégier le studio aux extérieurs. Qu’importe le fait qu’au nom des sacro-saints génériques-fleuves, la tirade interminable de la duchesse de Bassano ait été confiée à une Françoise Arnoul ânonnant péniblement des répliques auxquelles elle semble, par endroits, ne rien comprendre, et le rôle du chanteur des rues à un Gérard Philipe qui n’a jamais été aussi mauvais qu’ici – hormis peut-être dans la séquence " éthylisme " des Orgueilleux et l’intégralité de l’atroce Monsieur Ripois. À l’exception des deux artistes précédemment cités et de Paul Fort déclamant (fort mal) son Si tous les gars du monde…, les autres sont parfaits, à commencer par les femmes, au choix spirituelles et cocasses (Carton, Dantès, Fusier-Gir, Pierry), au mieux spirituelles et jolies (Darrieux, Morgan, Desmarets, Joyeux, Renant, Gisèle Pascal). Si les hommes ne sont pas en reste, Dhéran, Larquey, Martinelli, Dumesnil et Jean Weber (exceptionnellement juste) en tête, les deux véritables " triomphateurs " du film restent bien, in fine, Jacques de Féraudy/Voltaire et Lana Marconi/Marie-Antoinette, reprenant l’un et l’autre des personnages qu’ils avaient déjà interprétés dans Versailles… en moins bien : le premier n’a jamais eu l’occasion, au cinéma, de démontrer en si peu de temps l’étendue de son talent, la seconde s’y révèle (pour son ultime apparition à l’écran) étonnamment juste et émouvante. Performance d’actrice résumant à elle seule la démarche et l’esprit du film dans son ensemble. Après Versailles… et Napoléon, Guitry n’avait que deux choix possibles : faire dans la surenchère (plus cher, plus kitsch et plus somptueux) ou surprendre. Il a opté pour le second, le public n’a pas vraiment suivi (tant pis pour lui !) et c’est très bien ainsi (tant mieux pour les vrais guitryphiles) : artistiquement et cinématographiquement, la réussite est totale. Truffaut, qui adorait le film et fut en son temps, l’un des rares à le défendre, avait raison. Pour une fois ?


Sacha Guitry - Les Films (Vérités, contrevérités et paradoxes), réédition 2020. © Armel De Lorme / L’@ide-Mémoire Cinéma, mai 2020. Toute reproduction même partielle interdite, sauf autorisation écrite des auteur et éditeur.

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